Fin novembre, j’ai assisté à ma première soirée Traveler On Stage. Un concept simple qui m’a tout de suite séduite : 7 voyageurs se succèdent sur scène, pour raconter, en un temps limité, une expérience qui les a marqués. Road trip chaotique en Amérique du Sud, traversée tempétueuse de l’océan atlantique, découverte hasardeuse de l’Asie du sud-est, amitié improbable, expatriation… Pour une passionnée de voyages comme moi, il ne m’en a pas fallu plus pour attiser ma curiosité. Je me suis vite décidée à m’inscrire à cette soirée placée sous le signe de la découverte, de l’authenticité et de la convivialité.
Cette soirée, organisée par l’association bordelaise Traveler On Stage (TOS), est la 10e du nom. Cette édition automnale s’est déroulée dans la cale de l’Iboat, un ancien ferry reconverti en salle de concert/restaurant bien connu à Bordeaux. Comme nous sommes sur un réel bateau à quai, l’association a choisi le thème des pirates pour cette dixième soirée. C’est donc des « marins conteurs » que je vais écouter et je suis impatiente de prendre le large avec eux.
Ahoy ! Bienvenue à bord de Traveler On Stage !
Une photo, un verre et deux tickets
Me voilà à bord de l’IBoat, prête à réveiller mes envies d’ailleurs. À l’entrée du bateau, il y a un photobooth avec des accessoires en carton, faits maison sur le thème des pirates, question de se mettre dans l’ambiance. Allez, hop, je me décide à faire un petit cliché souvenir !
Un petit détour par le photobooth ©Traveler On Stage
Un peu plus loin, les bénévoles de Traveler On Stage m’accueillent chaleureusement. Les noms des participants sont listés, nul besoin de présenter son mail de réservation : au passage, on fait un petit geste pour la planète ! Car pour participer à cette soirée, il faut s’inscrire en ligne en amont de l’événement, le nombre de places étant limité. Quant au coût, il est dérisoire. Je n’ai payé que 5 €, et cela inclut un verre de bière ou de vin (rouge, rosé ou blanc). Un petit ticket m’est remis pour aller commander mon verre à siroter tranquillement en attendant le début de la soirée. Le seul bémol, c’est que le bar de l’Iboat est un espace fumeur, donc très enfumé et insupportable pour une non-fumeuse comme moi. Je commande donc mon verre en quatrième vitesse.
Direction le bar de l’IBoat !
En plus du ticket pour la boisson, les bénévoles donnent à chaque spectateur, un autre petit papier avec une icône. Pour moi, c’est un palmier. Le but est que toutes les personnes qui ont un ticket avec la même image se rencontrent et puissent échanger. Me voilà donc partie à la recherche de la team cocotier !
Embarquement immédiat
Une fois mon verre commandé, je me rends dans la cale du bateau. Le sous-sol de l’Iboat est aménagé en salle de spectacle, avec, devant la scène, des chaises et des bancs.
En place pour cette soirée d’évasion
Sur chaque place, il y a une carte postale de Traveler On Stage. Je m’installe au premier rang pour être sure de ne rien louper de ces récits de voyages qui s’annoncent passionnants. Derrière moi, d’autres spectateurs prennent place. Ça parle road trip, Taj Mahal, vélo à New York… Bref, ça respire le voyage ici !
« Le voyage est toujours plus fort quand tu le partages »
La soirée commence par une introduction faite de manière théâtralisée par deux bénévoles de l’association, relookés en corsaires pour l’occasion. Le concept de Traveler On Stage est présenté de manière ludique et sur le ton de l’humour. Certains membres du public sont même conviés à monter sur scène pour « faire les rames » du navire imaginaire dans lequel nous sommes tous embarqués !
Les bénévoles pirates nous présentent TOS et le déroulement de la soirée
Puis, sur l’écran en arrière-plan, un numéro de portable s’affiche. Il s’agit du numéro à utiliser pour poser nos questions aux speakers-voyageurs, car après les 7 présentations, il y aura un temps d’échange avec eux. Enfin, le premier speaker arrive sur scène… et le voyage commence !
C’est parti pour un voyage autour du monde, sans bouger de ma chaise
Luce, les yeux dans les cieux
La première à monter sur la scène, c’est Luce, une jeune femme pétillante, qui a un sérieux penchant pour les lieux vertigineux. Son pitch raconte donc une journée fictive passée en hauteur, aux quatre coins du globe. Mais si sa journée est imaginaire, les lieux qu’elle évoque ont réellement été visités. Elle débute par une randonnée matinale en Italie pour découvrir, depuis le sommet de la montagne, l’un des plus beaux panoramas de la botte.
Prendre de la hauteur avec Luce
La journée se poursuit par un apéro en haut du Marina Bay Sand de Singapour pour se remettre de cette marche épuisante, puis par un dîner à 50 m de haut, au restaurant Dinner in the Sky à Bangkok. La journée s’achève par une balade digestive au sommet du Victoria Peak à Hong Kong.
Le démesuré hôtel Marina Bay Sand
Tiens, les pérégrinations de Luce me rappellent un peu mes bons spots pour observer Bordeaux d’en haut ! Alors forcément, j’ai trouvé que son récit était bien construit et que l’idée de la « journée » était sympa. Luce nous dévoile que lors d’un prochain voyage, elle aimerait explorer les hauteurs de Montréal.
Barth, perdu en Bolivie
Barth, le deuxième speaker, nous emmène en Bolivie. Lors de son voyage, le pays connaît un blocus et d’importantes grèves des mineurs. Un contexte plutôt tendu, car les grévistes sont agressifs, voire dangereux, et les barrages routiers nombreux. Coincés à Sucre, Barth et ses amis décident alors de faire appel à un chauffeur privé pour sortir de la capitale et prendre les chemins de traverse.
Barth et son récit ponctué de « inflamos » (=on gonfle !)
Il nous raconte leurs péripéties avec un chauffeur qui ne connaît pas la route, perdus à plus de 3 000 m d’altitude sur des pistes caillouteuses et désertiques. Son périple est rythmé par les crevaisons de pneus du véhicule à l’état douteux. Ce récit nous laisse un sentiment d’angoisse lorsque l’on apprend que la nuit tombe et qu’ils sont perdus dans un bled où le taux de criminalité est assez élevé. Finalement, Barth et ses amis réussiront, avec l’aide de leur super chauffeur, à arriver à bon port.
Un récit assez drôle, malgré le contexte. L’un de mes préférés, car j’ai eu l’impression d’être embarquée dans la voiture avec Barth et ses amis.
Julien découvre son chemin de vie à l’étranger
Julien arrive sur scène et il semble être très à l’aise. Ce jeune Bordelais, nous embarque dans une période de sa vie où il est un peu perdu. Car à la fin de ses études, il n’est pas prêt à se lancer dans la vie active et une vie routinière ne l’attire guère.
Julien, sa vie d’avant et sa nouvelle vie
Après avoir refusé un contrat de travail en France, il décide de tenter l’aventure à Lincoln, en Grande-Bretagne. Sur place, il vit loin des expatriés français et apprend la vie avec ses déboires et ses belles surprises.
De retour en France, une nouvelle opportunité d’expatriation se présente à lui, mais en Italie cette fois. C’est à Trevise qu’il s’installe. La dolce vita lui inculque de nouvelles leçons et lui permet d’élaborer son chemin de vie.
Un quartier populaire de Venise
Les week-ends, Julien se réfugie à Venise pour s’y perdre, loin du tourisme de masse, et y découvrir ses quartiers populaires, comme celui de Cannaregio.
Aujourd’hui, Julien s’est construit et a trouvé sa voie. Il est revenu vivre en France où il est en train de monter sa start-up.
La Patagonie en camping-car avec Philippe
Philippe nous emmène lui aussi en Amérique du Sud. Il a toujours rêvé de voyager dans un van, tel la « mystery machine » de Scooby Doo. Philippe concrétise son rêve en achetant un camping-car en France qu’il fait expédier en Amérique du Sud (car il paraît que c’est moins cher que de l’acheter sur place). Il embarque avec sa chérie dans sa « maquina misteriosa » pour traverser le désert d’Atacama, les vignobles et les canyons jusqu’en Patagonie.
Pour Philippe, le camping-car c’est voyager à son rythme et multiplier les jolies rencontres
Ensemble, ils parcourent 25 000 km à travers des paysages grandioses. Son coup de cœur se situe sur la route 43 qui coupe l’altiplano : des roches volcaniques aux formes irréelles. Mais Philippe ne veut pas nous en dire plus afin de préserver cet endroit si beau.
En voyant ce paysage, on comprend le coup de cœur de Philippe pour cette région du globe ©Monigocan/Pixabay
Avant de repartir, il revend son camping-car (en faisant une petite plus-value au passage) et poursuit son tour du monde avec sa petite amie. Ils passent 7 mois en Amérique du Sud avant de partir explorer d’autres contrées.
Marielle, faire confiance au-delà des aprioris
C’est au tour de Marielle, jolie et grande jeune femme brune, de monter sur scène pour raconter ses aventures. Marielle est une voyageuse solo, adepte du couchsurfing. Elle décide d’aller visiter la Finlande en voyageant en train et ferry et en dormant chez l’habitant.
Marielle et son couchsurfing qui se révèle être une expérience marquante
Sa première étape de voyage la conduit en Allemagne, à Lübeck. Là, elle galère pour trouver un logement pour la nuit. Elle trouve finalement un hébergement chez un Afghan, lui-même réfugié politique. Après quelques petites mises au point avec son hébergeur (car le couchsurfing ce n’est pas Tinder comme le dit Marielle !), ils se lient d’amitié, bien que tout les oppose. Lui est plutôt discret, elle est exubérante. Il est réfugié, elle est touriste. Ils visitent ensemble Lübeck et échangent autour de leurs cultures si différentes. Elle passe 4 jours chez lui avant de rejoindre la Finlande.
Le charme de la ville de Lübeck ©Stephan Krahn/Pixabay
Puis, avant de repartir pour la France, elle passe à nouveau 4 jours chez son nouvel ami. Depuis, ils sont restés en contact, mais il n’a pas encore pu lui rendre visite, du fait de son statut de réfugié qui l’interdit de quitter l’Allemagne.
Ce récit montre que faire confiance au-delà des aprioris réserve de belles surprises, comme ce coup de cœur amical improbable.
Loïc, traversée en voilier du cercle polaire jusqu’en Bretagne
Loïc est un skipper professionnel. Il est missionné par une entreprise britannique qui souhaite tester un nouveau parcours de régate en bateau à voile entre le Groenland et la Bretagne.
C’est parti pour 1 mois de traversée en voilier avec Loïc
À son arrivée dans le grand nord, le décor est planté avec des peaux de phoques et des carcasses de baleines en tête de gondole de la supérette du coin. Loïc embarque alors avec sa coéquipière à bord de son bateau de course pour réaliser sa mission test. La première zone de navigation qu’ils traversent dans le cercle polaire n’est pas cartographiée et de nombreux icebergs sont présents. Heureusement, ils ne font que les observer de loin.
Les conditions météorologiques ne sont vraiment pas bonnes et Loïc connaît sa première tempête de neige… et son tout premier bonhomme de neige confectionné sur le pont du bateau aussi ! Loïc longe les côtes pendant 3 semaines. Il nous raconte ses galères avec une tempête comme il en a rarement connu, le laissant avec des voiles en lambeaux. Il nous fait aussi part de son émerveillement devant les aurores boréales.
La magie d’une aurore boréale
Et après quelques péripéties et des étapes un peu chaotiques, l’équipage traverse l’Atlantique en 11 jours, en rêvant d’une douche bien chaude à l’arrivée. Mais, manque de chance, la météo bretonne n’est guère plus accueillante et les douches de la capitainerie ne fonctionnent pas.
Loïc nous dévoile qu’à l’issue de cette traversée test, l’entreprise n’a pas validé le nouveau parcours de régate !
Anaïs, partir loin pour aller mieux
Anaïs est la dernière des speakers à monter sur scène. Cette jeune femme exaltée vient de passer une année très difficile et décide de tout plaquer pour partir se retrouver. Anaïs a besoin d’aller voir ailleurs pour se sentir mieux.
Anaïs et son voyage à durée indeterminée, à la recherche du mieux-être
Direction le Vietnam, où elle rejoint des amis expatriés. Elle visite ensuite seule le Laos, la Thaïlande, la Malaisie pour laquelle elle a un vrai coup de cœur. Dans tous ces pays d’Asie, elle trouve des populations accueillantes, souriantes, qui vivent avec peu et donnent beaucoup. Tout ce dont Anaïs avait besoin pour se sentir mieux.
La célèbre Maison Bleue sur l’île de Penang en Malaisie
Puis, elle décide de quitter l’Asie et d’aller faire un saut en Australie. Mais, contre toute attente, elle n’aime pas du tout ce pays : trop propre, trop ordonné, trop moderne, trop trop ! Aussi, elle choisit de poursuivre son voyage en Indonésie avant de repasser par le Vietnam.
Pendant son périple, elle ne fait jamais de mauvaises rencontres et ne se sent jamais seule. Après ces 9 mois à l’étranger, Anaïs rentre en France, mais rêve de repartir en Birmanie. À la fin de son speech, Anaïs lève les yeux vers le ciel et rend hommage à son papa. J’avoue que j’ai eu les larmes aux yeux après cet émouvant récit.
Après avoir parcouru virtuellement la planète grâce à ces 7 voyageurs, j’ai voulu en savoir plus sur Traveler On Stage et suis donc allée discuter avec une des bénévoles de l’association.
Traveler On Stage, comment çà marche ?
Le concept de TOS
Traveler On Stage (TOS) est une association créée en 2014 à Toulouse par deux amis voyageurs, Simon et Bertrand. Leur objectif : promouvoir le voyage quelle que soit sa forme et permettre de s’évader autrement, le temps d’une soirée, à travers les récits extraordinaires de voyageurs ordinaires. Qu’ils aient choisi de partir au bout de leur rue ou de faire le tour du monde, tous les voyageurs sont les bienvenus.
Les speakers-voyageurs doivent raconter leur expérience en quelques minutes : une anecdote, une sensation forte, une émotion, une mésaventure, une belle rencontre, un paysage inoubliable… Bref, tout est possible. À chaque soirée, entre 6 et 9 speakers se succèdent pour « pitcher » et raconter leurs aventures.
Session de questions/réponses entre le public et les speakers
Après les présentations de chacun, le public peut poser ses questions aux speakers puis échanger autour d’un verre. La soirée est tout public : couple, solo, jeunes et moins jeunes… Les enfants sont aussi bien sûr acceptés.
Traveler On Stage à Bordeaux
L’association toulousaine a proliféré. Aujourd’hui, il existe des soirées TOS dans plusieurs pays étrangers, mais aussi dans différentes villes de France : Paris, Rennes, Nantes et bien sûr Bordeaux proposent également des soirées TOS pour s’évader.
Traveler On Stage existe à Bordeaux depuis 3 ans. L’association bordelaise, qui compte un peu moins d’une vingtaine de membres bénévoles, en est à sa 10e édition, à raison de 2 ou 3 soirées par an. À ce jour, TOS Bordeaux a organisé ses soirées dans 8 lieux différents dont La Halle Héméra, Le Garage Moderne et Les Vivres de l’Art. Cela permet de changer de quartier et donc de public, mais également de varier la capacité d’accueil. Lors de la dixième édition à l’Iboat à laquelle j’ai assistée, il y avait environ 120 spectateurs. La jauge moyenne habituelle tourne plutôt autour de 150 personnes.
Le public nombreux lors d’une édition précédente ©Traveler On Stage
L’association est toujours en quête de nouveaux lieux pour les prochaines soirées. Alors, si vous pensez à des endroits sympas, n’hésitez pas à le mentionner en commentaire en dessous de cet article. Les seules conditions sont d’avoir une capacité d’au moins 100 places, d’avoir une scène et un vidéo-projecteur ainsi qu’un bar pour l’after show.
Comment devenir speaker ?
Pour être speaker, c’est très simple, il suffit de respecter les 3 A : être apolitique, acommercial et areligieux. Et c’est tout ! Partager son voyage est ouvert à tous, sans limite d’âge. La plus jeune speaker avait d’ailleurs 11 ans lors de sa présentation !
Mais on ne se lance pas sur la scène comme çà ! Les speakers-voyageurs se font coacher afin de préparer leur intervention : diction, posture sur scène, définition et respect d’un fil conducteur, rythme… tout est travaillé en amont de la soirée afin d’offrir au public des pitchs de qualité.
Bravo les speakers pour vos beaux récits !
Les coachs sont bien souvent d’anciens speakers. Une fois sur scène, le speaker-voyageur dispose de 6 à 8 minutes pour faire son speech, illustré d’images projetées sur écran géant. Et le résultat (en tout cas de l’édition à laquelle j’ai assistée) est vraiment génial !
Régulièrement, Traveler On Stage organise des TOS drinks : des soirées apéro pour échanger et recruter les speakers-voyageurs de demain. Avec toutes les histoires et anecdotes que j’ai à raconter, je me demande si je ne ferai pas partie des prochains speakers-voyageurs de Traveler On Stage ! Et vous ?